Hélène Boudreau nous confie ce qu'elle pense vraiment d'OnlyFans et des annonces récentes



Quelques heures après qu'OnlyFans ait suspendu la mise en place des nouvelles directives interdisant le contenu à « conduite sexuellement explicite » qui devaient entrer en vigueur à compter du 1er octobre, Narcity s'est entretenu avec la créatrice de contenu explicite, Hélène Boudreau.

Le 25 août, soit moins d'une semaine après avoir annoncé un changement à venir dans les règlements de la plateforme, OnlyFans a partagé un tweet mentionnant que l'entreprise revenait sur son choix après avoir reçu la confirmation qu'elle pouvait continuer d'inclure tous leurs créateurs et créatrices.

Suite à ces annonces qui ont fait réagir sur la sphère publique, Hélène nous confie les états d'âme par lesquels elle est passée, ses réflexions sur la plateforme et le domaine du sex work, ainsi que l'impact que de telles modifications auraient pu avoir sur son travail et ses revenus.

Comment as-tu réagi quand tu as appris qu'OnlyFans allait bannir le contenu « sexuellement explicite »?

« Pour vrai, on dirait que je m'y attendais. Je disais à mes amies, parce qu'on est un petit groupe de 50 filles sur OnlyFans qui se parlent tout le temps, je leur disais qu'il ne reste pas plus qu'un an ou deux ans.

« Ça a tellement été gros que je m'attendais à ce qu'il y ait quelque chose qui arrive. On ne peut jamais se fier aux plateformes. Instagram et Facebook peuvent fermer du jour au lendemain et on perd nos jobs. C'est pour ça que, toutes les filles, on a Snapchat, Facebook, Instagram et autres pour garder tous nos utilisateurs s'il arrive quelque chose. »

Et maintenant, comment te sens-tu par rapport à la suspension des modifications?

« J'ai été beaucoup choquée qu'ils bannissent le porn parce que c'est ça qui les a fait connaître et qui les a rendus riches. Ils ont gagné beaucoup d'argent avec nous et là, ils nous disent ' Bye, on n'a plus besoin de vous. ' On était vraiment sous le choc.

« Après trois jours, ils nous disent ' Non, on vous veut, venez. ' On se sent vraiment utilisées, on se sent comme s'ils riaient de nous. C'est complètement ridicule parce que, nous, c'est notre job. [...]

« Ça ne se fait pas, on sent qu'on est manipulées puis on a le goût d'aller ailleurs justement. »

Penses-tu qu'OF est redevable aux travailleurs et travailleuses du X qui rapportent des milliers à la plateforme?

« C'est sûr. Je pense qu'ils s'en sont rendu compte après deux ou trois jours qu'ils ont fait une bêtise, parce qu'ils voyaient tous les créateurs de contenu s'en aller vers d'autres plateformes.

« Justement, Tyga, le rappeur avait une plateforme OnlyFans puis il a quitté OnlyFans. C'était le plus gros créateur qui rapportait le plus de revenus à OnlyFans, il est parti et juste avec lui, je pense qu'ils ont perdu un million en un mois. Juste avec lui là.

« Je pense que ça a fait boule de neige. Ils ont vu sur Twitter tous les travailleurs du sexe qui voulaient partir, qui voulaient se créer d'autres plateformes. [...] On les garde comme en backup parce qu'on ne sait jamais si OnlyFans va fermer du jour au lendemain. »

L'entreprise a affirmé que les créateurs et créatrices recevraient un courriel avec plus d'informations, l'as-tu reçu?

« Je l'ai reçu, mais depuis trois jours, ils gardent ça vraiment pas clair. Ils sont vraiment dans le flou et ils nous laissent sous-entendre que tout reste [pareille], mais ce n'est pas encore clair. Donc, on a juste l'impression de se faire niaiser.

« C'est déjà assez dur d'être dans le sex work, on se fait basher, ridiculiser, juger et notre propre plateforme nous met dehors. C'est vraiment dur sur le moral des fois. »

Comptes-tu explorer d'autres avenues pour partager ton contenu exclusif?

« J'ai perdu mon Instagram il y a de ça trois mois et je l'ai [ retrouvé]. À partir de ce moment-là, je me suis dit ' Hey, il ne faut pas que je me fie à une seule plateforme. ' Elle peut tout le temps nous bannir parce que le sex work, on est rejeté de tout le monde, mais tout le monde en consomme.

« C'est l'ironie là-dedans. Donc,c'est sûr que nous, on a besoin de se faire des backups sur plusieurs plateformes pour garder notre contenu et nos fans, nos clients.

« Même si OnlyFansi nous bannit, même si on perd notre Instagram ou notre Facebook, la porn ou le sexe vont toujours exister. Je ne vois pas pourquoi toutes les plateformes se battent à nous effacer. [...] »

Penses-tu que la prise de parole qui s'est faite sur les réseaux sociaux a eu un impact sur ce changement de plan?

« Je pense qu'ils ont changé de décision parce que [premièrement] ils ont vu que les créatrices de contenu parlaient sur Twitter de quitter la plateforme, on avait toutes un plan B.

« Ils ont peut-être vu à quel point ils ont perdu de l'argent avec des créatrices qui ont fermé leur compte avec cette nouvelle-là.

« C'est comme si Lay's annonce qu'ils ne vendent plus de chips et que tout le monde leur dit ' Voyons donc, qu'est-ce que vous allez nous vendre? ' Lay's annonce qu'ils nous vendent juste le sac vide. Tout le monde fait comme 'Mais on achète du Lay's parce qu'on veut les chips et non le sac. '

« C'est comme avec OnlyFans, le monde consomme du porn. Ils ne vont pas aller sur OnlyFans pour parler de la pluie et du beau temps, on va être réaliste. [...] J'ai complètement été choquée de cette annonce-là. »

Quelle part de ton revenu mensuel tes gains OnlyFans représentent-ils?

« Ça représente 95 % de mon revenu mensuel. Oui, je fais de l'argent avec ma webcam, avec une autre plateforme qui s'appelle MYM (Meet Your Model) puis aussi un peu avec Instagram, mais vraiment pas beaucoup, mais ça englobe 95 % de mon revenu.

« Donc c'est pour ça que les filles capotaient. »

Comment as-tu vécu les derniers jours alors que tu étais dans l'incertitude?

« J'ai pleuré, j'ai fait des crises de panique. Je pense que toutes les filles, je n'ai pas de mots à dire, je pense qu'on était toutes anxieuses. On essayait de travailler, mais on n'y arrivait pas parce qu'on savait que notre job allait être perdue.

« Mais avec la nouvelle d'aujourd'hui, ils sont encore flous. On veut juste faire notre travail et on veut juste faire plaisir au monde. Le monde achète notre contenu, donc ce n'est pas à nous de nous blâmer. C'est l'offre et la demande. Il y a une demande donc nous l'offrons. [...]

« Je pense que c'est toujours bien de se faire plusieurs plateformes, plusieurs backups et de ne jamais se fier sur une plateforme, un employeur ou qui que ce soit et de continuer son chemin, peu importe ce qui arrive. »

Cet entretien a été modifié et condensé afin de le rendre plus clair.

À noter que l'écriture inclusive est utilisée pour la rédaction de nos articles. Pour en apprendre plus sur le sujet, tu peux consulter la page de l'OQLF.


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